Il est de ces moments où j’enrage. L’écriture est une manière de décharger mon éco-anxiété ou mon désespoir face au monde qui part en vrille.
Nous avons tout foutu en l’air. Nous avons tout détruit. Nous avons développé les conditions de notre propre effondrement civilisationnel. Et c’est inédit.
Nous avons produit, construit, consommé et pollué tout ce que nous pouvions jusqu’à mettre en sursis les conditions d’habitabilité de cette planète.
Mais comme le disait Pierre Rabhi, il n’y a aucun souci à se faire pour la Terre. Sa résilience et ses capacités d’adaptation sont infiniment gigantesques. Nous aurons laissé de notre passage sur Terre des traces terribles mais elle trouvera les ressources pour se régénérer sur le temps long. Un temps que nous ne connaîtrons probablement pas.
Quant à nous, nous devrons resister et nous adapter aux changements de conditions de vie sur Terre qui se font déjà sentir. Sommes-nous pour autant foutu ? Que nous reste-t-il ? Que faire ?
J’aimerais proposer ici une voie dissidente. Elle n’a trait ni au militantisme écologique, ni à la politique.
Cette voie, c’est celle de l’émerveillement. C’est une voie de contemplation de la nature, de ce qu’il en reste. De la faune, de la flore. C’est une voie pleine de sagesse qui nous pose en observateurs. C’est la voie de la pleine conscience sensible aussi. De celle qui nous permet de sentir l’air, capter les interactions à l’oeuvre. De celle qui nous rend pleinement alerte.
Il n’y a pas besoin de connaître les espèces d’oiseaux, de fleurs ou d’arbres pour s’émerveiller de la vie sur Terre. Il suffit de s’asseoir, de respirer, d’ouvrir les yeux et de guetter avec patience. En cultivant cette posture de contemplateur, on ne produit pas ni ne consomme. En revanche, on s’enrichit. On enrichit sa compréhension du monde tel qu’il nous est donné à voir. Brut. Rempli de choses complexes à décrypter ou simplement à regarder, à écouter, à sentir.
Tout ça n’est qu’une histoire de sens. Ils sont aujourd’hui trop sollicités. Les écrans nous accaparent la vue. La pollution nous embaument les narines. La ville nous pètent les tympans. Nos repas n’ont plus que le goût de pesticides. Et plus personne n’ose se toucher sans se faire de mal. Nos sens ont déviés de leur trajectoire. Nous leur avons fait prendre la direction des abîmes.
S’émerveiller à nouveau des choses les plus simples et essentielles c’est reprendre le pouvoir sur ce vieux monde qui s’affaisse mais qui pour autant laisse derrière lui des traces indélébiles. Observons-les, dénonçons-les autant que nous jugeons essentiel de reconsidérer, à sa juste place, le vivant dans son ensemble.